« C’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez » (Mt 7, 15-20)
En
ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Méfiez-vous des faux
prophètes qui viennent à vous déguisés en brebis, alors qu’au-dedans ce
sont des loups voraces. C’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez.
Va-t-on cueillir du raisin sur des épines, ou des figues sur des
chardons ? C’est ainsi que tout arbre bon donne de beaux fruits, et que
l’arbre qui pourrit donne des fruits mauvais. Un arbre bon ne peut pas
donner des fruits mauvais, ni un arbre qui pourrit donner de beaux
fruits. Tout arbre qui ne donne pas de beaux fruits est coupé et jeté au
feu. Donc, c’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez. »
II
y a eu des prophètes aux premiers temps de l'Église (Act 11,28; 21,11).
Rarement ils prévoyaient l'avenir. Lorsqu'ils parlaient, sagement et
calmement, au nom de Dieu sous l'impulsion de l'Esprit, ils
s'attachaient surtout à lire les événements de l'Église ou de la
communauté à la lumière de la parole de Dieu et de son dessein, à
interpréter la volonté de Dieu dans des circonstances concrètes, et
assez souvent ils encourageaient, exhortaient, édifiaient la communauté.
Parfois aussi l'Esprit leur donnait de dévoiler les secrets des cœurs
(1 Co 14, 3. 23).
Assez
vite, dans la primitive Église, un discernement s'imposa entre vrais et
faux prophètes. "Mes bien-aimés, écrivait saint Jean, n'ajoutez pas
foi à tout esprit, mais éprouvez les esprits, pour voir s'ils sont de
Dieu, car beaucoup de prophètes de mensonge se sont répandus dans le
monde" (1 Jn 4,1). D'ailleurs Jésus, de son vivant, avait proposé un
enseignement nuancé. D'une part il s'en était pris à ceux qui se
fermaient d'avance à toute nouveauté venue de Dieu : "Jérusalem, toi qui
tues les prophètes ... [toi qui rejettes les charismes et leurs
porteurs inattendus]" (Mt 23,37). Mais d’autre part il avait mis sa
communauté en garde, et c'est ce que nous rappelait à l'instant
l'évangile de saint Mathieu : "Méfiez-vous des faux prophètes, qui
viennent à vous vêtus en brebis". (On est toujours tenté par la
facilité !)
Et
immédiatement Jésus indiquait le seul critère infaillible pour les
identifier : "Vous les reconnaîtrez à leurs fruits !" La vérité et
l'authenticité d'un croyant finissent toujours par ressortir, par passer
dans ses œuvres, par révéler ce qu'il est, ce qu'il cherche, ce qu'il a
vraiment trouvé.
Encore
de nos jours un devoir de lucidité, une tâche de diagnostic spirituel,
incombe aux communautés, car nous vivons un début de siècle où beaucoup
se disent prophètes, porteurs d'un message libérateur, ou lecteurs
inspirés des signes du temps présent.
En
ce temps où foisonnent les modes théologiques, pastorales, liturgiques,
un discernement spirituel s'impose au niveau de la pensée. Non pas pour
retomber automatiquement dans le déjà vu, le déjà su, le déjà entendu,
car l'Esprit Paraclet apporte chaque jour à l'Église sa grâce de
nouveauté, et les disciples de Jésus n'ont pas à craindre la vie, la
jeunesse, la créativité. Mais il y a, aujourd'hui comme au début de
l'Église, de vrais et de faux prophètes.
La
pierre de touche pour les reconnaître ? c'est de savoir si ce prophète
opère un véritable dévoilement, une illumination, une mise en lumière du
dessein de Dieu, ou si au contraire il propose une réduction du mystère
de Jésus ou un affadissement du sel de l'Évangile :
- le faux prophète tourne le dos aux événements fondateurs et aux promesses de Dieu ; - le faux prophète opère un tri dans les paroles de Jésus et choisit son menu dans la Révélation ; - il confond la nouveauté de Dieu avec la nouveauté de ses propres théories ou de son langage ;
Bref
: il fait taire les questions de Dieu, celles qui construisent l'homme
et le mettent en marche, pour faire entendre ses propres questions sans
parfois souhaiter vraiment de réponse.
À
une époque de refonte des esprits, des cultures, de l'affectivité, le
même discernement spirituel doit jouer au niveau de l'action. Face à
telle initiative, à tel projet, à telle orientation qui se présente
comme prophétique, comme porteuse des promesses de l'avenir, une
communauté héritière du prophétisme de Jésus, soucieuse de lire
l'aujourd'hui dans la lumière de Dieu, peut se poser des questions
toutes simples, celle qui résonnent dans le Nouveau Testament, et
regarder les fruits déjà produits et ceux qui se préparent :
- est-ce que cela construit, édifie la communauté ? (C’est le critère des vrais charismes selon Paul) ; - est-ce que cela resserre l'unité de l'Esprit par le lien de la paix ? - est-ce que cela crée selon Dieu, dans la sainteté et la vérité ? - est-ce que les moyens préconisés sont ceux de l'évangile et des Béatitudes ?
- est-ce que par-là les pauvres sont évangélisés, entendent une bonne
nouvelle qui les remettra dès aujourd'hui, "rien que pour aujourd'hui",
sur la route de l'espérance ?
Mais
il est une question plus urgente encore que chacun de nous ne manque
pas de se poser, quand retombe l'ardeur de la prière, quand se relâche
l'écoute de la parole, quand fléchissent la vigilance fraternelle et le
désir de témoigner :
"Qu'ai-je fait moi-même de la grâce prophétique déposée en moi par le don de l'Esprit ?"
DANS LES VISIONS DE MARIA VALTORTA
Date Mardi 15 février 28
Lieu Cornes d'Hattin
Livre Tome 3 – ch 171.3 2ème année vie publique
(…) Gardez-vous des faux prophètes et de ceux qui enseignent
l’erreur. Ils viennent à vous comme des agneaux, mais ce sont des loups
rapaces. Ils viennent à vous sous des dehors de sainteté, mais ils se
moquent de Dieu. Ils prétendent aimer la vérité, mais se nourrissent de
mensonges. Examinez-les avant de les suivre. L’homme a une
langue pour parler, des yeux pour voir et des mains pour faire des
gestes. Mais il y a autre chose qui témoigne avec plus de vérité de ce
qu’il est réellement : ses actes. Et que voulez-vous que soient deux
mains jointes pour la prière si ensuite l’homme est voleur et adultère ?
Que sont deux yeux qui chavirent de tous côtés pour jouer aux inspirés,
si ensuite, une fois passée l’heure de la comédie, ils se plaisent à
regarder avidement la femme ou l’ennemi dans un désir de luxure ou
d’homicide ? Que voulez-vous que soit la langue qui sait entonner la
chanson mensongère des éloges et séduire par des paroles mielleuses
quand, par derrière, elle vous calomnie et est capable de se parjurer
pour vous faire passer pour des gens méprisables ? Qu’est la langue qui
fait de longues oraisons hypocrites, mais s’en va aussitôt détruire la
réputation du prochain ou séduire sa bonne foi ? Elle est répugnante !
Les yeux et les mains qui mentent sont répugnants. Mais les actes de
l’homme, ses vrais actes, c’est-à-dire sa façon de se comporter en
famille, dans le commerce, envers son prochain et ses serviteurs, voilà
ce qui témoigne : “ Voici un serviteur du Seigneur. ” Car les actions
saintes sont le fruit d’une religion vraie. Un bon arbre ne
donne pas de mauvais fruits, comme un arbre mauvais ne donne pas de bons
fruits. Ces ronces pleines d’épines pourront-elles donner des raisins
savoureux ? Et ces chardons encore plus piquants pourront-ils faire
mûrir des figues délicieuses ? Non, en vérité vous ne cueillerez sur les
premières que quelques mûres peu agréables et ce sont des fruits
immangeables que donneront ces fleurs, épineuses bien qu’elles soient
des fleurs. L’homme qui n’est pas juste pourra inspirer le
respect par son aspect, mais par cela uniquement. Même ce chardon
plumeux ressemble à une touffe de fils d’argent très fins que la rosée a
ornée de diamants. Mais si par inadvertance vous le touchez, vous voyez
que cette touffe n’est qu’une masse de piquants qui vous font souffrir,
et sont nuisibles aux brebis. Aussi les bergers les arrachent-ils de
leurs pâturages et ils les jettent au feu allumé pendant la nuit pour
que même les graines n’échappent pas à la destruction. Juste mesure de
prévoyance. Moi, je ne vous dis pas : “ Tuez les faux prophètes et les
fidèles hypocrites ”, mais au contraire : “ Laissez-en la charge à Dieu.
” Je vous dis pourtant : “ Faites attention, écartez-vous-en pour ne
pas être empoisonnés par leurs sucs. ” (…)
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