La
tradition dit que les trois habitants de la sainte maison de Nazareth,
Jésus, Marie et Joseph ne parlaient presque jamais. Il y régnait un
silence plus profond que dans une maison de Chartreux où les vents des
Alpes mugissent à travers les corridors et ébranlent les fenêtres,
tandis que tout le reste est silencieux. Les paroles de Jésus étaient
très rares. C'est là la raison pour laquelle Marie les conservait dans
son cœur, parce que, comme des trésors, elles étaient rares autant que
précieuses.
Si
nous réfléchissons, nous verrons qu'il ne pouvait guère en être
autrement. Dieu est très silencieux. En ce qui concerne Marie, le récit
de l'Évangile confirme la tradition. Le petit nombre des paroles de
Marie qui s'y trouvent rapportées est étonnant. Cela est si frappant que
quelques saints contemplatifs ont supposé que, dans son humilité, Marie
avait commandé aux évangélistes de supprimer, en ce qui la concernait,
tout ce qui n'était pas absolument nécessaire à la doctrine du Christ.
Sans
nul doute, aucun saint ne pratiqua le silence comme elle le fit. Mais
comment eût-elle pu n'être pas silencieuse ? Une créature qui avait vécu
si longtemps avec le Créateur ne pouvait parler beaucoup ; son cœur
était plein, son âme était réduite au silence. Elle avait porté Jésus
dans ses bras. Elle avait veillé sur lui pendant qu'il dormait. Elle lui
avait donné sa nourriture ; elle l'avait regardé dans les yeux. Il lui
avait sans cesse dévoilé son cœur. Elle avait appris à le comprendre.
Entre
le Créateur et la créature, dans des relations telles que celles qui
existaient entre Jésus et Marie, le silence, mieux que les paroles,
était un langage. Qu'auraient pu faire les paroles ? Qu'auraient-elles
pu dire ? Elles n'auraient pu porter le poids des pensées de la Mère,
encore moins celui des pensées du Fils.
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