« Gardez-vous de mépriser un seul de ces petits » (Mt 18, 1-5.10.12-14)
À
ce moment-là, les disciples s’approchèrent de Jésus et lui dirent : «
Qui donc est le plus grand dans le royaume des Cieux ? » Alors Jésus
appela un petit enfant ; il le plaça au milieu d’eux, et il déclara : «
Amen, je vous le dis : si vous ne changez pas pour devenir comme les
enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des Cieux. Mais celui qui
se fera petit comme cet enfant, celui-là est le plus grand dans le
royaume des Cieux. Et celui qui accueille un enfant comme celui-ci en
mon nom, il m’accueille, moi. Gardez-vous de mépriser un seul de ces
petits, car, je vous le dis, leurs anges dans les cieux voient sans
cesse la face de mon Père qui est aux cieux. Quel est votre avis ? Si un
homme possède cent brebis et que l’une d’entre elles s’égare, ne
va-t-il pas laisser les 99 autres dans la montagne pour partir à la
recherche de la brebis égarée ? Et, s’il arrive à la retrouver, amen, je
vous le dis : il se réjouit pour elle plus que pour les 99 qui ne se
sont pas égarées. Ainsi, votre Père qui est aux cieux ne veut pas qu’un
seul de ces petits soit perdu. »
Chaque
évangéliste a sa manière personnelle de proposer les paraboles de
Jésus. Ainsi, là où saint Luc parle de brebis perdue et applique l'image
à tous les hommes, Matthieu décrit une brebis égarée que Jésus vient
sauver, et il enchâsse la parabole entre deux rappels des "petits",
c'est-à-dire, concrètement, pour saint Matthieu, les plus humbles et les
plus délaissés de chaque communauté chrétienne.
On
pourrait dire : brebis perdue / brebis égarée, où est la différence ?
Effectivement la différence apparaît peu dans notre langue, mais dans le
Nouveau Testament l'égarement a toujours trait à la foi. "Que personne
ne vous égare", disait Jésus (Mt 24,4). De même saint Paul avertissait
Timothée : " Les hommes mauvais et imposteurs vont progresser dans le
mal, égarant les autres, égarés eux-mêmes ! Mais toi, demeure ferme dans
ce que tu as appris et accepté comme certain" (2 Ti 3,13). Et l'on
retrouve chez Jean, chef de communauté, la même mise en garde :
"Petits-enfants, que personne ne vous égare (1 Jo 3,7; cf. 2,26) !" Ceux
qui égarent les chrétiens sont clairement désignés : ce sont d'une part
les faux prophètes (Mt 24,11.24; Ap 19,20), les hommes mauvais et
imposteurs, d'autre part le Satan, "qui égare la terre entière" (Ap
12,9). Mais l'on peut s'égarer soi-même si l'on se prétend sans péché (1
Jo 1,8).
Ainsi,
dans la parabole telle que la propose Matthieu, ce sont les petits de
la communauté chrétienne, les gens sans défense, qui sont menacés dans
leur foi par les slogans des faux prophètes. Et cela, Dieu ne le
supporte pas. Sur ce point Jésus est formel : "Votre Père qui est aux
cieux veut qu'aucun de ces petits ne se perde" ; et ces réflexes du
Père, Jésus les fait siens.
La
parabole de Matthieu complète donc celle de Luc : non seulement
Jésus-Berger est venu chercher ceux qui étaient perdus, mais il prend
fait et cause pour tout ceux que l'on méprise dans les groupes humains,
tous les "petits" que l'on égare sans scrupule.
Dans
la parabole selon Matthieu, la brebis égarée est beaucoup moins
révoltée que victime, et la joie du berger met surtout en lumière
l'immense pitié qui habite le cœur du Christ comme celui du Père. Quel
recours auraient les "petits", les "humainement faibles", si Dieu ne les
prenait en charge ? Quel espoir de salut auraient-ils, si le Christ ne
s'était pas fait homme pour mieux se faire reconnaître comme Berger ?
L'essentiel
de la parabole est cette révélation de Dieu, de ses réflexes et de ses
méthodes, qui sont aussi ceux de Jésus. Quant à nous, nous perdrions
sûrement notre temps si nous nous demandions quelle brebis nous sommes,
brebis de Luc ou brebis de Matthieu, brebis qui se retrouve loin de Dieu
parce qu'elle n'en fait qu'à sa tête, ou brebis incapable de se
défendre et qui est ballottée à tout vent de doctrine ou au gré des
impressions spirituelles fugitives et contradictoires. Il est probable
que nous sommes un peu les deux, un peu perdus et un peu égarés.
Ce
qui importe, c'est de nous redire aujourd'hui : Si je me laisse
rejoindre par le Berger, je peux vivre une amitié qui n'a pas de nom sur
la terre parce qu'elle sera à la fois pardon, dialogue, don de vie et
irruption dans la lumière de Dieu.
DANS LES VISIONS DE MARIA VALTORTA
Date Mardi 20 février 29
Lieu Capharnaüm vers Dalmanutha
Livre Tome 5 - ch 352.6 3ème année vie publique
(…) Un enfant de sept à huit ans court derrière Jésus en
sautillant. Il le rejoint en dépassant le groupe plus qu’animé des
apôtres. C’est un bel enfant aux cheveux châtain foncé, courts et tout
bouclés. Dans son visage mat, brillent deux yeux noirs intelligents. Il
appelle avec familiarité le Maître, comme s’il le connaissait bien. « Jésus, dit-il, tu me laisses venir avec toi jusqu’à ta maison ? – Est-ce que ta mère le sait ? demande Jésus en le regardant avec un doux sourire. – Elle le sait. – Vraiment ? » Jésus, tout en souriant, le fixe d’un regard pénétrant. « Oui, Jésus, vraiment. – Alors, viens. »
L’enfant fait un saut de joie et saisit la main gauche que Jésus
lui tend. C’est avec une amoureuse confiance que l’enfant glisse sa
petite main brune dans la longue main de mon Jésus. Je voudrais bien en
faire autant moi-même ! « Raconte-moi une belle parabole,
Jésus » dit l’enfant en sautant aux côtés du Maître et en l’observant
par en dessous avec un petit visage rayonnant. Jésus aussi le
regarde avec un sourire joyeux qui lui fait entrouvrir la bouche
qu’ombragent des moustaches et une barbe blond-roux que le soleil fait
briller comme de l’or. Ses yeux de saphir foncé rient de bonheur quand
il les pose sur l’enfant. « Qu’as-tu à faire d’une parabole ? Ce n’est pas un jeu.
– C’est plus beau qu’un jeu. Quand je vais dormir, j’y repense,
puis j’en rêve et le lendemain je m’en souviens et je me la redis pour
être gentil. Elle me rend plus sage. – Tu t’en souviens ? – Oui. Veux-tu que je te dise toutes celles que tu m’as racontées ? – Tu es un bon garçon, Benjamin, meilleur que les hommes qui oublient. En récompense, je te dirai la parabole. »
L’enfant ne saute plus. Il marche, sérieux, attentif comme un
adulte, et ne perd pas un mot, pas une inflexion de la voix de Jésus
qu’il regarde avec attention, sans même regarder où il met ses pieds. «
Un berger qui était très bon apprit qu’il y avait dans un endroit de la
création un grand nombre de brebis abandonnées par des bergers qui
étaient mauvais. Elles étaient en danger sur d’affreux chemins, dans des
herbages empoisonnés et elles s’approchaient de plus en plus de sombres
ravins. Il alla dans ce pays et, déposant tout ce qu’il avait, il
acheta ces brebis et ces agneaux. Il voulait les amener dans
son royaume, parce que ce berger était roi comme l’ont été aussi de
nombreux rois en Israël. Dans son royaume, ce troupeau aurait trouvé des
pâturages sains, de l’eau fraîche et pure, des chemins sûrs et des
abris solides contre les voleurs et les loups féroces. C’est pourquoi ce
berger rassembla ses brebis et ses agneaux pour leur dire : “ Je suis
venu vous sauver, vous amener là où vous ne souffrirez plus, où vous ne
connaîtrez plus ni pièges ni malheurs. Aimez-moi, suivez-moi, car je
vous aime beaucoup et, pour vous posséder, j’ai fait toutes sortes de
sacrifices. Mais si vous m’aimez, mon sacrifice ne me pèsera pas.
Suivez-moi et partons. ” Et le berger en avant, les brebis à la suite,
prirent le chemin qui mène au royaume de la joie. A chaque
instant, le berger se retournait pour voir si elles le suivaient, pour
exhorter celles qui étaient fatiguées, encourager celles qui perdaient
confiance, secourir les malades, caresser les agneaux. Comme il les
aimait ! Il leur donnait son pain et son sel. Il commençait par goûter
l’eau des sources pour voir si elle était saine et la bénissait pour la
rendre sainte. Mais les brebis – peux-tu croire cela, Benjamin
? – les brebis, après quelque temps, se lassèrent. Une d’abord, puis
deux, puis dix, puis cent restèrent en arrière à brouter l’herbe jusqu’à
se gaver au point de ne plus pouvoir bouger et elles se couchèrent,
fatiguées et repues, dans la poussière et dans la boue. D’autres se
penchèrent sur les précipices, malgré les paroles du berger : “ Ne le
faites pas. ” Comme il se mettait là où il y avait un plus grand danger
pour les empêcher d’y aller, certaines le bousculèrent de leurs têtes
arrogantes et plus d’une fois essayèrent de le jeter dans le précipice.
Ainsi beaucoup finirent dans les ravins et moururent misérablement.
D’autres se battirent à coups de cornes et de têtes, et s’entretuèrent.
Seul un agnelet ne s’écarta jamais. Il courait en bêlant et, par
ses bêlements, il disait au berger : “ Je t’aime. ” Il courait derrière
le bon berger et quand ils arrivèrent à la porte de son royaume, il n’y
avait qu’eux deux : le berger et l’agnelet fidèle. Alors le berger ne
dit pas : “ Entre ”, mais : “ Viens ” ; il le prit sur sa poitrine, dans
ses bras, et l’amena à l’intérieur en appelant tous ses sujets et en
leur disant : “ Voici. Celui-ci m’aime. Je veux qu’il soit avec moi pour
toujours. Quant à vous, aimez-le, car c’est celui que mon cœur préfère.
” La parabole est finie, Benjamin. Maintenant peux-tu me dire qui est ce bon berger ? (…)
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