Or, Marie avait pris une livre d’un parfum très pur 
et de très grande valeur ; elle versa le parfum 
sur les pieds de Jésus qu’elle essuya avec ses cheveux.     
Évangile selon saint Jean, chapitre 12, verset 3
Marie de Béthanie est décidément incorrigible et sa sœur Marthe aurait pu s’arracher les cheveux au fond de sa cuisine. Il ne lui a pas suffi, la dernière fois, de boire les paroles de Jésus, les yeux pleins d’amour, il faut à présent qu’elle dépense l’argent familial pour acheter un parfum de grand prix, en parfumer les pieds de Jésus et les essuyer avec ses cheveux. Mais cette fois-ci, Marthe ne dit rien, elle a compris. C’est Judas qui se mêle de ce qui ne le regarde pas. 
Comment parler d’argent quand il s’agit de cadeau ? Et comment ne pas voir que le prix du parfum n’est rien à côté de la valeur du geste de Marie ? « Des pauvres, vous en aurez toujours parmi vous » répond Jésus à Judas. À cet instant, le pauvre c’est lui qui, déjà, fait face à son supplice. Marie vit la Passion de Jésus par anticipation et la douceur de ses gestes devance la violence du supplice à venir.
Marie est une contemplative, dit-on, c’est surtout une amoureuse et c’est un peu la même chose. 
Des pauvres à aider comme on s’acquitte d’une obligation, comme on fait une bonne action, nous en aurons toujours. Mais le pain ne réjouit pas à lui seul le cœur, et les pauvres ont d’abord besoin d’aimer et d’être aimés. Avec respect, avec tendresse. Nous sommes tous des mendiants d’amour, des pauvres qui, parfois, réchauffent le cœur d’autres pauvres. Dans le registre de l’amour, il n’y a pas de pauvres et pas de riches. Bien malin est celui qui pourrait dire qui de Jésus ou de Marie, ce jour-là à Béthanie, était le pauvre ou le riche. On ne voit que deux cœurs brisés qui entrent en communion.